Maladie et entourage : Trouver la bonne attitude

Quelle attitude adopter face à une fibrose pulmonaire ?

Stéphane Vagnarelli

Par M. Stéphane Vagnarelli, Psychologue dans le service de Pneumologie, Hôpital Avicenne, Bobigny

La fibrose pulmonaire limite l’autonomie des personnes qui en sont atteintes, et avouons-le, donne souvent un sacré coup au moral... La famille comme les amis s’en rendent bien compte, mais ils ne savent pas toujours comment s’y prendre pour aider la personne aimée, de peur de la froisser ou de la démoraliser davantage.

Parfois heureusement l’entourage arrive à trouver les attitudes et les mots justes, ceux qui permettent de se sentir compris, d’être aidé sans forcément être infantilisé, et encouragé sans forcément être dans le déni. Mais malheureusement cela ne se passe pas toujours aussi bien.

Les patients confient alors aux professionnels les difficultés qu’ils rencontrent avec leur entourage.

Parfois heureusement l’entourage arrive à trouver les attitudes et les mots justes, ceux qui permettent de se sentir compris

On retrouve ainsi souvent les situations suivantes :

L’entourage est inquiet mais se veut résolument rassurant.

Il minimise les plaintes et les inquiétudes qu’exprime le patient, et affirme que tout va très bien se passer... « Madame la Marquise » a alors envie de compléter le patient, quand lui, dans son corps, ce n’est pas du tout ce qu’il ressent.

Résultat on n’est pas vraiment compris, ni vraiment aidé, ce qui peut même être agaçant non ?

Pour d’autres patients, le problème avec leur entourage c’est qu’il ne leur laisse plus rien faire.

Ah ça ils sont chouchoutés, dorlotés, et chéris, ce qui est très gentil convenons-en, mais pas forcément bon ni pour le moral, ni pour le maintien de l’autonomie.

On peut alors culpabiliser de leur en faire le reproche, c’est tellement gentil de leur part, mais là aussi dans le temps cela peut être très agaçant de se sentir ainsi « mis sur la touche » voire infantilisé, alors que ce n’est pas forcément ce dont on a besoin, ou pas tout le temps du moins...

Autre cas fréquemment rapporté par les patients, l’entourage n’est pas vraiment plus présent, ni plus aidant, qu’avant la maladie.

Le patient ne s’en plaint pas vraiment, mais il est tout de même souvent un peu déçu par cette non prise en compte de sa situation. Il faut dire aussi, pour comprendre la réaction de l’entourage, que le patient déploie souvent beaucoup d’énergie en leur présence pour montrer bonne figure comme on dit.

Il ne se « plaint » pas (cela n’a jamais été son tempérament !), et il ne leur demande rien (il n’aime pas déranger !). Mais résultat là encore, il ne se sent ni vraiment compris, ni vraiment aidé.

Dernier cas fréquent enfin, celui des patients qui se disent eux vraiment déçus par l’attitude de certains de leurs proches, car ils semblent s’éloigner d’eux depuis qu’ils sont malades...

Ce qui fait de la peine, ce qui fait même beaucoup de peine parfois, ce qui est blessant aussi, et peut même donner le sentiment d’avoir été trahis. D’autant que ce sont parfois les personnes sur lesquelles on pensait pouvoir compter dans les moments durs.

Mais comment comprendre ces attitudes si décevantes ? C’est vrai que certains manquent de cœur, mais c’est au final assez rare. Souvent au contraire, ce n’est pas que ces personnes qui s’éloignent aient moins de cœur, mais qu’elles sont au contraire plus sensibles. La maladie les bouleverse, le fait de voir le patient diminué les touche, et du coup elles ne savent plus comment réagir, quels mots trouver, quelles attitudes adopter face au désarroi du patient... Elles se sentent terriblement mal à l’aide à l’idée d’être confrontées à cette situation, espacent alors peu à peu les appels comme les visites, et la distance se creuse petit à petit...

Illustration enlaçade

C’est dur en effet de trouver la bonne attitude avec son entourage.

Tout comme c’est dur visiblement pour l’entourage de trouver la bonne attitude avec la personne aimée quand elle est malade.

Sans indication claire du patient sur comment et selon quel dosage il a besoin d’être soutenu, l’entourage agit comme il pense devoir agir, ou comme il pense que le patient aimerait être aidé, voire comme eux-mêmes s’ils étaient malades aimeraient être aidés...

Bref, peu de chance donc pour que cela soit adapté au besoin du patient !

Je vois bien que quand tu agis de telle ou telle manière c’est pour m’aider, et cela me touche, mais cela me donne aussi le sentiment de... (d’être infantilisé, pas compris, pas soutenu...). Je crois que cela m’aiderait davantage si tu pouvais plutôt...

La solution la plus adaptée serait finalement d’oser exprimer sincèrement à son entourage ce que l’on ressent, et en même temps comment on aurait besoin d’être aidé dans cette situation : parfois l’aider ce sera de parler de tout autre chose que de la maladie, parfois ce sera de le laisser faire ses propres expériences sans être chouchouté, parfois ce sera de lui donner des conseils, et parfois ce sera de ne rien lui dire de rassurant, mais juste d’être là, et de l’écouter...

Maintenant il faut le reconnaître, ce n’est pas toujours évident d’exprimer sincèrement ce que l’on ressent, ce qui nous aiderait... Les sous-entendus sont rarement entendus, ce que l’on dit sous le coup de la colère aussi, et ne rien dire parce que cela ne devrait même pas avoir besoin d’être dit, n’est sûrement pas la meilleure manière d’être écouté.

En revanche ce qui marche bien ce serait d’arriver à dire quelque chose comme ceci…

Illustration 2 femmes souriantes

Le discours à avoir

« Je vois bien que quand tu agis de telle ou telle manière c’est pour m’aider, et cela me touche, mais cela me donne aussi le sentiment de... (d’être infantilisé, pas compris, pas soutenu...). Je crois que cela m’aiderait davantage si tu pouvais plutôt... »

Avec un peu d’entraînement vous verrez, cela marche très bien !

Maintenant une autre difficulté à dépasser est de s’autoriser à demander de l’aide à son entourage, et cela n’est pas facile.

Dans son parcours de vie, on a souvent appris à se débrouiller tout seul, à ne pas déranger... Bref, on culpabilise vis-à-vis de notre entourage, et du coup on n’ose pas exprimer clairement ce qui nous aiderait. Mais c’est souvent parce que l’on est plus exigeant avec soi-même qu’on ne l’est avec les autres.

Prenons un exemple…

Quelle est la personne la plus proche de vous ? Si c’était cette personne qui avait une fibrose, et qui vous disait culpabiliser à l’idée de vous « déranger », qu’est-ce que vous lui répondriez ? Vous voyez, on s’en veut parfois de demander du soutien, mais c’est quelque chose de normal, et ceux qui vous aiment le feront avec autant de cœur que vous l’auriez fait pour eux.

 

En conclusion

La maladie bouleverse les interactions entre le patient et son entourage, c’est inévitable. Cet entourage a parfois du mal à trouver la bonne attitude, ce qui peut le rendre maladroit, et pas très à l’aise. Seul le patient est alors en mesure d’aider l’entourage à trouver la bonne attitude, et de le rassurer sur sa capacité à apporter toute l’affection et l’aide qu’il désire apporter.